Les dieux doivent bien rigoler...

Je suis donc en train de tenter de m'endormir, avec à côté de moi une magicienne bondissante qui secoue le matelas en laissant libre cours à ses pulsions de gamine frustrée par un père trop strict; en-dessous un croque-mitaine apprivoisé et caractériel qui n'apprécie guère de sentir son "toit" s'aplatir sur sa personne à chaque rebond de la dame de céans; autour de moi une pièce totalement nouvelle qui est un vilain patchwork de trucs pourris made in Enki, et de trucs qui auraient pu être bien (parce que je les ai choisis) mais qui ne le sont pas parce qu'ils sont posés à côté de trucs pourris made in Enki; sans oublier qu'à l'étage du dessus ronfle benoitement ma génitrice, le sommeil sans aucun doute parsemé de visions de moi en costume disant oui à une Enki en robe de meringue.

Je suppose que, sans être parfaitement pessimiste, je peux le proclamer clairement: les choses ne peuvent pas aller plus mal.

Histoire de vous faire bien comprendre mon calvaire, voici un résumé non exhaustif de la nuit d'horreur que j'ai vécue.

19h11: première somation à Enki pour qu'elle arrête de sauter.

19h12: deuxième somation. Jack se joint à moi en grognant fermement.

19h14: troisième somation, accompagnée d'un malencontreux (1)mouvement de poignet qui fracasse par le plus grand des hasards le nez d'Enki. Enki arrête de sauter. Jack rugit de satisfaction. Ma mère tousse bruyamment afin de me rappeler l'heure tardive.

19h16: inondation d'hémoglobine coulant du nez d'Enki, les draps prennent une couleur rouge profonde et s'humidifient désagréablement. Succombant à ma bonté innée (2), je ranime ma maîtresse qui a l'opportunité de se soigner.

19h17: Enki me crie dessus. Ma mère chante à pleins poumons pour ne pas entendre ce qu'elle appelera demain la "petite dispute d'amoureux".

19h19: Je menace Enki de lui en foutre une autre. Enki se tait. On change les draps.

19h22: On se recouche. Jack bougonne, il n'aime pas tous ces allers-retours.

19h27: quarante-troisième retournement d'Enki, accompagné d'un profond soupir. Moi non plus, je n'ai pas sommeil, mais c'est pas une raison. Je menace Enki.

19h44: Je somnole enfin quand Enki me tapote l'épaule: elle a envie d'aller aux latrines. Je ronchonne et me rendors.

19h49: Enki me dit que ça presse vraiment.

19h55: Enki dit qu'elle s'en fout et que c'est pas elle qui changera les draps encore une fois. Je me lève.

20h04: alors que je parviens enfin à retrouver ma somnolence, Enki revient des toilettes.

20h42: je me suis endormi, mais je fais un mouvement dans mon sommeil et fracasse au sol une lampe-volcan. Enki se réveille en sursant et hurle comme une possédée. Ma mère demande si l'on est en train de lui fabriquer des petits-enfants. Je vais me passer la tête sous l'eau pour m'empêcher de vomir.

21h13: Jack fait un mauvais rêve et se cogne la tête contre les lattes. Il couine.

21h15: Jack couine encore.

21h18: Jack couine toujours. Enki se lève et se glisse sous le lit pour aller le consoler. Je soupire et résiste à la tentation de remplir de braises son oreiller.

21h54: Enki revient de son expédition sous le lit.

22h31: Poutchou gratte à la porte. Je l'ai oubliée. Je vais lui ouvrir. Enki râle.

22h33: Enki ne veut pas que Poutchou dorme en boule au pied du lit, elle dit qu'elle va foutre de la terre partout.

22h34: Poutchou croque l'orteil d'Enki. Enki hurle. Ma mère dit qu'elle est fière d'avoir un fils aussi actif. Je vais vomir.

23h01: après d'âpres négociations, Poutchou va dormir sur le tapis.

23h57: Poutchou rencontre Jack.

23h58: Poutchou se bat contre Jack.

00h17: je réussis à séparer ma plante du croque-mitaine. Je cale Poutchou dans le pouf-shamallow. Enki dit qu'elle veut dormir. Je me retiens de la frapper.

00h19: Enki voudrait retourner aux toilettes. Je prends sur moi et me relève.

00h58: Enki revient. Elle a fait un tour par la cuisine.

1h34: Enki a trop mangé, elle a envie de vomir. Elle court vers les latrines. Je la suit pour lui tenir les cheveux.

1h48: Enki et moi revenons. Enki ne vomit jamais. Poutchou a profité de notre absence pour terminer son combat contre Jack. Poutchou a gagné le premier round. Jack pleure. Enki retourne sous le lit. Maman demande si Enki a déjà accouché, et se demande quel est le cycle de gestation des humains. J'ai envie de pleurer.

2h27: Enki sort du lit et se recouche, après m'avoir fait lever.

2h29: Enki veut retourner aux toilettes.

2h40: Enki revient des toilettes.

4h17: Poutchou veut sortir faire ses besoins. Enki dit qu'une plante n'a pas de besoins.

4h19: Poutchou mord l'oreille d'Enki. Enki hurle. Maman dit qu'elle ne veut pas trop de petits enfants quand même, ça coûte cher à Noël.

4h24: Je fais sortir Poutchou qui s'attaque à la porte.

4h48: Poutchou veut revenir dans la chambre. Je lui ouvre.

4h49: Jack profite que Poutchou passe devant le lit pour lui bondir dessus, histoire de faire le deuxième round.

5h01: je parviens à les séparer. Enki dit qu'elle en a marre que je l'empêche de dormir.

5h02: je tente d'étouffer Enki avec mon oreiller.

5h03: Enki réussit à se dégager et m'ordonne de ne plus la toucher. Dépité, j'obéis.

5h31: Enki veut retourner aux toilettes. Je tente de me suicider avec une bougie.

5h39: Enki revient.

6h04: ma mère, aussi discrète que le troupeau de gnous moyen, se lève.

6h09: ma mère tambourine à la porte et s'engouffre dans la chambre en tonitruant "j'espère que vous avez passé une bonne nuit!" et appuie son propos de clins d'oeil appuyés.

6h10: Maman trébuche contre une patte de Jack et renverse le café sur les draps. Je me sens humide. Enki se sent ébouillantée.

6h24: Après avoir changé les draps et déjeuné sous le regard enchanté de Maman, cette dernière s'esquive et dit qu'elle va se préparer pour accueillir la famille. Je fonds en larmes.

(1) Ahaha.
(2) Rigole, Enki, rigole...

6h25 : j’ai envie de me pendre.
6h26 : pareil.
6h27 : encore pire.



Je tapote l’épaule de Kaev pendant que Poutchou lui tapote le genou et que Jack lui mord les doigts. (1)
Belle équipe.

Je m’en vais vers la fenêtre histoire de voir si une armée n’est pas à nos portes pour nous pourrir le mariage.
Forcément non.
On ne peut même pas compter sur ses ennemis.(2)

« On va s’en sortir. (3) Suffit juste qu’on survive à cette journée. Après tout ça pourrais être pire il pourrais y avoir ma famille en plus… ».
Et là…sans crier gare
Kaev relève la tête pour me regarder.
Tout le monde est aux aguets.
On n’entend plus aucune respiration…
L’air se fait lourd…le silence pesant…Tintiiinn (4)

« Poutchou tu ferais bien de reprendre ta respiration, tu vas nous claquer dans les mains sinon.
- houuuuuuuuu.
- décompresse Kaev…le jour où tu verra un Maye’sa s’intéresser à ce que je fais. (5)
- on ne sais jamais…avec la poisse qu’on a en ce moment manquerais plus que ton père débarque …
- Enki !...
-AAAAAAAAAAAAAAAAAAAhhhhhhhhhhhhhhhhhhhh !
- …tu m’as broyé le tympan.
-…maîtresse adulée. Je dérange ?
- j’ai cru que c’était…
- c’est Jef. (6)
- J’ai apporter un petit remontant…Je me suis dit que pour une journée comme celle là c’était plus que nécessaire.
- merci. »

Il pose le plateau et sors de la chambre, je me penche vers la mixture, ça a l’odeur du café, la texture du café…le goût du café.
C’est dans ces cas là que je me dit que la notion du remontant n’est pas la même chez tout le monde.

« Non sérieux rien à craindre du côté de chez moi… c’est ta famille qu’il va falloir gérer… tu sais j’ai une idée.
- Pitié !
- non ça pourrait marcher. »






(1) ne prenez pas ça à la lettre pas besoin d’envoyer vos légion pour repeindre la façade on à déjà ce qu’il faut.
(2) Faut pas trop en demander à un Croque–mitaine.
(3) mais n’importe quoi !
(4) gros suspense quoi…Titiiin ça fait suspense non ? Ça fait aussi coiffure à la con je vous l’accorde. bon, j’arrête les frais.
(5) ce qui est faux en fait. Mon père s’est beaucoup intéresse à mon cas quand j’ai brûler son école. A mon cas et à mes fesses en fait.
(6) on est assez en galère comme ça pour se sortir de cet épisode du Rp sans en rajouter…alors non pas de Maye’sa en plus. Et puis c’était trop prévisible qu’il débarque !

Je tends l'oreille, sait-on jamais... Je suis à court d'inspiration, de toutes façons. Au pire je dis non, elle insiste, je redis non, elle reinsiste, je la baffe, et elle se tait. Rien à perdre.

Et devinez quoi? C'est pas con ce qu'elle raconte. Je prends bien une ou deux minutes pour la dévisager, ébahi.

"Quoi? J'ai un bouton sur le nez?
- Non, c'est... Enfin si, mais c'est pas la question. En fait j'étais en train d'admirer le spectacle de la naissance d'un embryon microscopique de neurone entre tes deux oreilles... C'est impressionnant quand tu ne t'y attends pas...
- T'es obligé d'être désagréable? Je te sauve la mise, là!
- C'était un compliment pour moi...
- Ouais... Je comprends pourquoi tu es célibataire.
- Va mourir.
- Toi d'abord. "

Nous nous défions du regard quelques minutes, puis, sans crier gare, elle me souffle dans l'oeil. Ce qui fait que je le cligne, lui offrant une facile victoire à ce jeu idiot de "je-te-regarde-avec-un-regard-noir-inquiétant-du-chaos-de-la-mort-sans-cligner". Je soupire, et me lève, suivi par Enki.
Nous nous faufilons à travers les patrouilles de gardes, qu'aucun ne puisse dire à ma mère où nous sommes, et nous arrivons enfin à destination (1).

Enfin, après quelques heures de dur labeur, nous ressortons, un poil plus optimiste, et retournons sagement dans notre chambre. Jeffrey nous attend, droit comme un piquet, portant une montagne de chantilly sur un plateau.

"Votre robe, maîtresse vénérée.
- J'avais dit pas trop de fanfreluches!
- C'est-à-dire... C'est madame votre mère qui m'a nommé responsable de la confection du vêtement, et je l'ai fait selon les patrons d'une certaine... tante Berthe... "

Il se tourne vers moi, le regard suppliant. Je vole à son secours.

"Tu as eu raison de faire ce qu'elle a dit.
- Mais...
- Il aurait rejoint Roland.
- Mais, déesse adulée, j'ai néanmoins eu la possibilité d'accéder à votre souhait, j'ai mis plein d'agraffes de type soutien-gorge à l'arrière!
- Tu vas rejoindre Roland.
*clac*
- AAAAAAAAAAAHHHHH!!
*FRRRRSSSSSSHHHH*
- Mais... c'est ignoble!! Il ne reste que des cendres!!
- C'est vrai, j'aurais pas du... Ma mère va me pourrir parce que je laisse du désordre dans ma chambre...
- Pauvre Jeffrey...
- Pas une grosse perte, selon moi...
- KAEV!! ENKI CHERIE!! ILS SONT LA!!
- Faites que ça marche faites que ça marche faites que ça marche...
- Bah, au pire on se marie, c'est pas si grave...
- J'aime pas ton humour.
- Je sais. "

Je me dirige, la mort dans l'âme, vers l'étage supérieur. Et en effet, ils sont là.

"Bjour p'pa.
- Salut fiston! Alors, enfin décidé à faire honneur au savoir-faire familial en matière de progéniture?
- Euh... oui... Respire ma chérie... P'pa, je te présente Enki.
- Hihihi... 'chantée...
- Un poil maigrichonne, mais point trop désagréable à l'oeil...
- Enfin un homme de goût dans cette famille!
- ...ça va tes yeux, P'pa?
- Ah, tu sais, l'âge, je deviens un peu myope...
- Je m'en doute, oui...
- Saloperie...
- Salut frangin! Alors, c'est elle ta poule? Tu t'es enfin décidé à te trouver une nénette capable de te supporter?
- Humrfr...
- HUM... Euh... oui... Et toi alors, comment s'appelle cette ravissante... euh... demoiselle?
- Oh fais pas ta mijaurée va, je sais ce que tu penses... Les morts-vivants, surtout les vampires, c'est pas trop le style de la maison, ça fait un peu désordre... Mais elle est adorable, je te jure... Et puis tu la verrais au pieu... (2)
- Pardon?
- Oh excuse-moi ma chérie, je ne voulais pas dire... Euh... Voilà, je te présente Ténébra... Tu as prévu quoi pour bouffer alors, à ton mariage?
- Aïoli, pourquoi?
- Enki la fer... euh... fais attention à ton humour ma chérie...
- Alors garnement on n'embrasse pas son papy?
- Euh... Si... Salut grand-père...
- Eh bien, tu ramènes enfin des non-salamandres dans la famille? C'est bien ça, ça fait du sang neuf...
- Où ça?
- Reste calme ma chérie...
- Coucou frangin! Dis bonjour à tes neveux!
- Bjour.
- Ils sont pas adorâââbles?
- Oh si. Qu'ils sont chous.
- Ah oui ils ressemblent à... à leur... euh...
- Tu as prévu des berceaux et des biberons j'espère?
- Non, mais j'ai prévu des haches et du cyanure, au cas où...
- Toujours aussi drôle mon cher frère!
- Je suis sur que tu rigolais pas.
- Gagné.
- Hé ben blaireau, tu t'es trouvé une poupée qui dit oui?
- Eva.
- Alors, t'es pas content de me revoir?
- Non.
- Kaev sois poli!
- Non, ma chère cousine. "

(1) Que je ne vous indiquerais pas, étant moi aussi adepte du suspense.
(2) Pardon pour les vieux jeux de mots... Je fatigue.

Faut que je me souvienne de ce moment.
D’une pour lui faire payer plus tard, et de deux parce que j’ai trouvé quelqu’un qui remballe Kaev et qui n’a pas l’air suicidaire. D’un autre côté elle fait partie de sa famille alors elle doit quand même être complètement fêlée.

« C’est elle la malchanceuse ?
- oui, c’est moi.
- Enki.
Je la toise, elle me toise, nous nous toisons, enfin bref on fait connaissance.
- ouais t’aurais pu trouver pire vu ta tête.
- charmante.
- C'est pas exactement ce que j'aurais dis. »

Je fais un tour d’horizon de ce qui ne sera donc sans doute jamais ma belle famille et je me dis…
« Bon rat je l’ai échappé belle.
- tu penses tout haut chérie.
- oh pardon.
Je lance un regard en coin à la cousine Eva tente en retour un sourire sardonique du plus belle effet.
« Très réussit.
- le sourire ?
- oui.
- merci. »

Apres avoir raconté à voix basse (1) notre nuit endiablée, Raymonde (2) revient vers nous avec la vieille tante Huguette (3) qui glousse en jetant un regard prometteur à Kaev.
Je me disais aussi qu’il devait avoir de la consanguinité dans cette famille.

« C’est tout à fait chaaaaarmand ! Kaev mon chou tu serais un amour si tu nous guidait vers la salle principal. Ton père meurt de soif !
- si c’est toi qui les guides ils vont finir desséchés. Eh !Remarque c’est pas une mauvaise idée.
- enki.
- desserre les dents chéri. Je plaisanteRoland !
- carbonisé.
- Jef !
- pareil.
- Nico…en bonnet de nuit j’oubliais. Ah oui attends…heu l’autre avec la trompette là.
- André ?
- Non avec le nez bizarre et les yeux qui partent en live.
- Régis.
-oui ! Voila ! REGIS !
- mââdâme ?. Annonce une voix nasillarde derrière moi
- tu t’entraînes pour l’accent ?
- certes mônsieur.
- génial. Conduit donc nos invités vers la salle des trônes.
- si vous vôulez bien meu suivrre messieurs dâmes. C’est par ici.
- For-mi-da-ble ! Eva ! Tu vas voir comment ils sont installés c’est merveilleux ! Ils ont tout bonnement une trentaine de chambres ! Et la décoration ! Oh la décoration… »

Et je les regarde s’éloigner au petit trot.
« Bon débarras.
- tu penses encore tout haut.
- non là j’ai fais exprès.
- Bon il est temps d’exécuter la phase deux de notre plan.
- ça en jette quand même.
- ça en jette si ça marche. Et si ça marche pas c’est toi que je jette. Par la fenêtre.
- J’adore les mots doux chéri. Mais pas maintenant. Allons les rejoindre. »

*clac*
*clac*



(1) A voix basse car seulement la moitié de la Thessalie a entendu.
(2) alias belle maman pour ceux à la traîne.
(3) tante Huguette : trois cents ans de célibat endurcit …très mais alors très très endurcis.

"Alors là tu vois, c'est l'endroit où ils travaillent!
- Ah parce qu'ils taffent ensemble?
- Oui, ils se sont rencontrés au bureau! Et ça a été le coup de foudre immédiat, tu t'en doutes! Et... Ca ne va pas ma chérie?
- Kof... Krr... Hrumf... Non non, ça va... J'ai avalé une cahuète de travers...
- Tu veux que je te tape dans le dos?
- NON SURTOUT P... Euh... Non, c'est gentil mon chéri, ça va mieux maintenant.
- N'hésite pas surtout.
- Ne sont-ils pas adorâââbles? "

J'ai la nausée. Mais je dois me retenir, nous devons mettre en place notre plan.

Nous avons rapidement installé une longue table devant nos deux trônes, et ajouté quelques fauteuils. Et nous sacrifions à la millénaire coutume tribale de l'apéro en famille. Enki et moi nous faisons discrets sur nos trônes.

A droite, à côté d'Enki, Maman et Gabriel discutent architecture sous le regard méprisant d'Eva, à qui j'ai refilé le fauteuil le plus inconfortable.

A gauche, mon père s'applique à engloutir le plus de cahuètes et biscuits que son estomac peut contenir, tandis que la tante Huguette assène avec passion ses discours de féministe convaincue à propos de l'inutilité des hommes sur les mondes à une Ténébra qui l'écoute avec une indifférence polie, tout en lorgnant dangereusement le cou des serviteurs qui s'activent autour de nous.

Morgane, elle, discute avec mon grand-père des études supérieures de ses enfants, qui ne seront d'actualité que dans quatre ou cinq siècles, mais comme elle le dit si bien, "mieux vaut en parler maintenant, ce sera fait!".

"...et donc Benoît sera cadre supérieur dans la compagnie du gaz (1), comme son père...
- Depuis quand ton benêt de père a été cadre supérieur?
- J'ai entendu, beau-père!
- Ben... Il a travaillé au dix-huitième étage, comme laveur de carreaux... C'est supérieur, non?
- Ah d'accord... Laveur de cadres supérieurs.
- Beau-père ça va mal finir...
- ...et Sylvestre deviendra bourreau, c'est une bonne situation non?
- Oui, en plus avec la famille qu'il a, on pourra lui donner deux ou trois trucs pour commencer du bon pied... Pas vrai garnement?
- Pour sur Grand-Père...
- Ah, tu as toujours été le plus doué de mes petits-enfants pour tout ce qui touche à la torture, pas vrai?
- Ah ça... De ce côté là, pas de doute, c'est le meilleur.
- Enkieuh... "

Mais mon grand-père rayonne de fierté. Je l'aime bien mon Papy. C'est le mouton noir de la famille, c'est un Homme-Lézard, et donc pas une Salamandre pure-souche, ça fait mauvais genre... N'empêche qu'il me racontait des histoires formidables quand j'étais petit, quand il allait tuer des aventuriers dans les tombeaux perdus... Et en plus, pour l'alcool, il ne craint personne!

" ...Tu pourras récupérer le petiot en vacances, pour lui donner des conseils? Ta mère m'a dit que vous aviez une salle de torture, non?
- Pourquoi pas... Mais ce n'est pas sur qu'on habite toujours ici, tu vois...
- Oh?
- Quoi? intervient ma mère. Comment ça, vous n'allez pas vivre ici?
- Ben... En fait, dieu c'est un contrat à durée déterminée, d'ici moins d'un an on devra rendre les clés, que le propriétaire fasse le ménage...

Attention, c'est là que commence la mise en place de notre plan subtil. Je donne un coup de coude discret à Enki, pour lui faire comprendre que j'attaque. Elle aquiesce. Puis elle se recroqueville sous la douleur.

- D'ailleurs, c'est assez prenant comme travail, dieu, vous savez... On n'a pas beaucoup de temps à nous...
- C'est vrai, renchérit Enki, c'est pour ça, on n'a pas trop le temps d'organiser le mariage...
- Demain on entame une grande tournée parmi nos croyants, ensuite on a des apparitions près des sources, des buissons à enflammer, des croisades à organiser pour convertir les païens par l'épée, tout ça...
- Sans compter qu'on ne va pas tarder à devoir organiser les pélerinages, mon chéri...
- Ah oui, ça fait longtemps qu'on ne les a pas forcés à faire trois-cents bornes à genoux en chantant des cantiques...
- Enfin, on ne voulait pas vous le dire comme ça, mais on est très très occupés pour le moment... Ca nous chagrine beaucoup, mais on ne pourra pas se marier avant un long moment...
- A vrai dire, aujourd'hui c'est notre seul jour de liberté avant des mois... "

Pause dramatique.

"Eh bien, on n'a qu'à organiser le mariage maintenant! tonitrue ma mère.
- Ah ben oui tiens, pas con, en voilà une idée qu'elle est bonne... "

Règle numéro 1 du bon manipulateur: toujours faire croire à sa victime que l'idée vient d'elle.

" ...en plus tout est prêt, la robe a été finie cette nuit, les caves sont pleines et tout le monde est là... Ce serait dommage de ne pas en profiter! "

Approbation générale, Enki et moi faisons semblant d'y réfléchir, puis d'accepter de bonne grâce, recueillant un enthousiasme général (2).

"Ah mais non, j'y pense! Ma chérie, on ne peut pas vous marier sans votre famille!
- Aheuh... Oui mais... en fait, ma famille... Ca les branche pas trop, les mariages... Ils aiment pas vraiment... Et ils habitent loin, tout ça...
- Tatata, on ne peut pas vous marier sans votre père qui vous tient le bras pour vous mener à l'autel!
- Euh... mais... en fait mon père est... manchot! Voilà, c'est ça! Il n'a pas de bras, alors ça ne sert à rien qu'il vienne, pas vrai? Ahaha...
- Manchot? Le pauvre homme... Mais vous ne m'aviez pas dit qu'il était archimage? Ca doit être dur de pratiquer la magie sans bras...
- Bah, tu sais Maman, ça ne dépend pas des bras... Regarde Enki, elle y arrive bien sans cerveau... Enfin, si on peut appeler ça de la mag...
- MERCI mon chéri, tu es adorable, va donc chercher à boire pour fêter le merveilleux événement...
- Tout de suite mon amour. "

Et je me dirige vers la cave pour aller chercher nos bouteilles... légèrement modifiées, pendant qu'Enki peaufine une explication foireuse selon laquelle son père pratiquerait les arts mystiques avec ses pieds.

___________
(1) Rappel pour ceux qui ne suivent pas: le gaz dans le plan du feu, c'est le fréon, et c'est pour la clim, pas pour faire cuire les raviolis.
(2) Sauf d'Eva, qui est une chieuse de toutes façons.

« Avec les pieds ?Merveilleux!
- oui, voilà.
Mais qu’est ce que je fous là …
- il fait comment pour marcher ?
- oh !heu, il marche et quand il veut se servir de la magie il s’assoit et il mouline des pieds. Impressionnant à voir, pour sur.
- j’imagine bien !
- moi j’imagine mal.
Moi aussi.
- Au début c’était un peu difficile mais après quelques années, il a prit son pied !
- Mouhahaha ! (1)
- tu ne nous prendrais pas pour des truffes par hasard ? Me glisse Eva dans l’oreille en allant s’asseoir sur le trône de Kaev.
C’est décidé je la hais.
- tu veux vraiment que je te fasse garder mes six frères et sœurs ? (2)
- ah. Et puis c’est bien un mariage entre nous ! Ils pourront toujours nous réinviter une fois chez les parents d’Enki.
Ben voyons.
- excellente idée Eva !
- oui ! Tu viendras les garder à domicile, El’ener’it te montrera sa collection de poils. C’est fascinant tu verra. »
Prend ça dans tes dents.

Si Kaev ne reviens pas dans les dix secondes je balance les marshmallows…

« Alors il parait que la nuit a été mouvementée ?
Je veux mourir.
- je pensai pas que le cousin était capable de tels exploit la dernière fois que j’ai parlé avec une de ses copine elle a dit que…
nyanyanya. Je veux rien savoir !
- ...Et qu’après il avait…
Nananana! Écoute pas …Enki n’écoute pas.
- mais bon il est peut être plus doué avec une humaine. (3)
Au se-cour.
- ça doit être ça ! Ah Chéri !! Tout le monde meurt de soif… »

Je me lève en trombe, arrache la bouteille des mains de Kaev et sert une triple dose à la cousine Eva.

« Vas y doucement.
- si tu savais ce qu’elle vient de me dire.
- quoi ?
- un truc à propos de ta dernière copine.
- donne moi ça. »

Et le voila qui m’arrache la bouteille des mains pour la faire boire de force à la cousine Eva.
« Regardez les ! Ne sont ils pas mignons tout les trois ?
- je m’occupe de ta mère…
- ouais !
- tenez belle maman !
- une bonne rasade, hein !
- comptez sur moi !
Ça c’est fait.
- et les petits ils en prendront bien une goutte dans leurs biberons ?
- je ne sais pas si…
- fais pas ta mijaurée ! Ça va leur faire les dents aux gamins ! Pas vrai garnement ?
- exact ! »

Voila ils sont tous servis. Je me rapproche de Kaev qui me regarde avec son sourire en coin.
Le grand moment…
Tout le monde se lève le verre à la main.
Belle maman nous regarde les larmes aux yeux et beugle :
« Au mariage ! »

Je jubile. Je regarde chaque membres de ma précieuse belle famille vider son verre d’une traite.
« Enki !
- Quoi ?
- on a un problème avec la tante Huguette.
- …oh la vieille bique. Elle n’a pas bu. »




(1) même rire que son fils.
(2) oui ça va je sais j’en ai que 5. Mais Jude’itheane compte bien pour deux.
(3) commentaire complétement RP, faut le reconnaitre...

...car tu vois, mon cher neveu, l'alcool est une drogue, un poison, et même pour fêter une occasion il est hors de question que... "

Je déteste les gens qui ont des convictions ou des principes. Histoire de bien montrer qu'ils sont différents du lot, il faut qu'ils infligent à ceux qui les entourent leurs idées préconçues et si profondément ancrées qu'il faudrait un léviathan pour les extraire de leur vase.

"Tatie, tu ne voudrais quand même pas gâcher mon mariage? Ca pourrait me faire regretter de t'avoir accompagnée à ton meeting féministe, le siècle dernier...
- Tu est allé à un meeting féministe?
- ...c'est pas la question. Hein tatie, pour me faire plaisir?
- Non mon grand, n'insiste pas, c'est contre mes principes...
- Ils n'en sauront rien tes principes... C'est un hydromel spécial, qu'Enki et moi avons mis des heures à préparer pour vous... Tu nous vexerais, tu sais?
- Je suis désolée, Kaev, mais l'alcool n'est...
- ... qu'un substitut de bonheur qui ôte la conscience pour se vautrer dans la fange du délire inconscient, je sais, j'ai lu tes bouquins. Mais un tout petit verre? Promis, c'est pas fort!
- Combien de degrés?
- Euh... à peine trente-neuf?
- Trente-neuf??
- Euh... voui.
- Ah ça va, je croyais que c'était un alcool fort moi... Donne-moi ce verre, que je lui fasse sa fête à ton jus de fruit...
- Volontiers... A ta santé, tante Huguette... "

Hop, une de moins. Mais la tante Huguette n'est pas le seul problème. Ténébra n'a pas l'air non plus décidée à ingurgiter le précieux liquide... On n'avait pas pensé à ça, les vampires, ça ne boit pas d'alcool... Ma future belle-soeur me contemple avec des yeux glacés, son verre plein devant elle. Réfléchis, Kaev, réfléchis...

"Enki, donne moi le nom de ton serviteur préféré.
- Hein?
- Réfléchis pas, vas-y.
- Euh... Alex?
- Alex?? le masseur?
- Oui, il est divin...
- ALEX!!
- Oui monsieur? fait une espèce de grand type aux épaules larges en apparaissant immédiatement.
- Bois ça, fais-je en lui tendant une bouteille d'hydromel.
- Hein?
- Pardon?
- Cherchez pas à comprendre. Bois ça, je te dis.
- Bien monsieur. "

Le larbin s'empare de la bouteille et en descends plusieurs goulées. Enki me regarde d'un oeil effaré. Alex s'essuie les lèvres, le regard un peu brumeux, et me jette un regard interrogateur. Je le saisis par le col et le propulse aux pieds de ma cadavérique belle-soeur.

"A ta santé, Ténébra!
- Merci beau frère... C'est agréable de voir que vous n'êtes pas tous des rustres, dans cette famille. "

Et ni une, ni deux, elle empoigne Alex et plonge avec ravissement ses crocs dans sa carotide, pendant que je retiens fermement Enki.

"Mais t'es dingue! Elle va le tuer!
- C'est déjà fait. Et c'était ça, ou alors on avait des témoins.
- Et pourquoi t'as demandé mon serviteur préféré?
- Juste pour t'emmerder.
- Saloperie. "

La famille entière a désormais un peu au moins de cette hydromel dans les veines. Il ne reste plus qu'à attendre...

Pas longtemps, d'ailleurs... En quelques secondes, ma smala dodeline de la tête et s'écroule tête la première contre la table.

"Y'avait quoi déjà dans ton somnifère?
- Concentré de Derrick, extrait de monopoly, coquelicot, pluie de mercredi après-midi, verveine, poussière d'amphithéâtre de psycho et tsé-tsé écrasée.
- Efficace.
- Certes. Bon, maintenant va mettre ta robe.
- C'est obligé les photos?
- Indispensable. Si je n'ai pas de photos de mariage ma mère exigera qu'on refasse la cérémonie exprès. Va te changer.
- Tu mets ton costume en tricot?
- Même pas en rêve.
- Alors je vois pas pourquoi je mettrais ma robe...
- Pour me faire plaisir?
- Rêve.
- Parce que ma mère serait déçue si l'on ne voyait pas la robe de la tante Berthe sur les photos?
- Et alors?
- Très déçue.
- Et al... Oh... Tu veux dire, déçue au point de...
- Te flamber la tête? Oui.
- Je vais me changer.
- Bien. Je m'occupe de trouver l'appareil de ma mère.
- Tu sais que je te hais, au fait?
- Moi aussi.
- Pour le meilleur et surtout pour le pire.
- Jusqu'à ce que ta mort nous sépare. Amen. "

Je trottine dans les couloirs pendant que la foule en délire me jette du tapioca (1) pour célébrer ce non-mariage mémorable, tout en chantant des louanges à la vénérable Enki pour s’être sorti de ce bourbier d’une main de maîtresse. (2)

J’arrive en dérapant dans la chambre et me détruisant le genou dans la penderie. Encore une idée de kaev ça.

« RRRrrrr ?
- oui, ça marche !
- RRaourr ?
- je ne sais pas.
- RRRRRaaaa !
- oui je sais je m’active je m’active… »

Je parle à Poutchou. Tout va bien.
Je tiens la discussion à une plante verte. Je vais bien.
Il suffit de se convaincre.

Après dix minutes de déshabillage et ré habillage, (3) j’ai enfilé les chaussures, mis le truc horrible dans mes cheveux et passé la robe bouffante blanche meringue powa, reste plus qu’a…

« KAAEEEEV !
On devrait pas ce marier plus souvent il arrive au premier appel maintenant.
- par iciiiiiii !
- ouais ça va. Quoi ?
- J’arrive pas à fermer la robe !
- t’as encore grossi ?
- comment ça encore ?
- laisse tomber. Et tu as plus de larbins ?
- une moitié est morte et l’autre moitié est en dépression.
- rrrrraourrrrrrrrr !
- rhaaa, c’est pas vrai. »

Il regarde les agrafes, soupire et s’y colle avec l’enthousiasme du troll moyen à essayer un tutu.
Mais il y arrive ! Difficilement soit, avec force de grognement je vous l’accorde mais bon.
Bel effort.
D’un autre côté c’est ça ou on se marie alors forcément ça motive.

« J’ai fini. Dit il en s’asseyant épuisé sur le lit.
- tu as été formidable chéri.
- Enki, évites moi t’es sous entendu pourris.
- bien chéri »

Et je détales dans les couloirs avec à mes basques Kaev suivit de prés par Poutchou qui fait pousse des grognements stupides.
On ne change pas une équipe qui gagne. (4)

« On commence par qui ?
- les témoins.
- j’ai pas de témoin. Et j’ai plus de larbins.
- ils sont ou les autres ?
- en train de se pochtronner au Mc.
- RRRRRRRRR !
- t’as raison ! Prends Poutchou !
Oh non. Pitié.
- oh non pitié.
- Enki.
Je me baisse pour ramasser Poutchou pendant que Kaev fait tenir son frère contre le mur à grand renfort de balai (5).
- essaie de me mordre et je te jure que je te lâche à mes belettes ok ?
- RRRRRrrrrr !
- c’est toujours un plaisir de négocier avec toi. »





(1) chacun ses coutumes.
(2) ça va ! Je sais, y’a personne et je cours dans les couloirs en essayant de pas me bûcher….et je suis pas vénérable non plus d’accord. Méheu !
(3) plus on va vite moins on y arrive. C’est un fait commun à beaucoup d’univers. C’est comme Kaev : exprès pour nous faire déféquer.
(4) après c’est sur faut voir ce qu’on gagne. hum…
(5) no comment.

Les photos de notre non-mariage seront mémorables...

Histoire de vous faire partager notre bonheur (ahaha la blague), quelques photos souvenirs qui ne tombèrent jamais entre les mains de ma famille...

Là, c'est Enki qui se dispute avec son témoin, à cause d'une bête histoire de tissu déchiré, je vous demande un peu...



Là, allez savoir pourquoi, Enki n'a pas voulu que je montre cette photo à Morgane... pourtant, j'avais eu l'inspiration de faire une pose tendre, avec mes deux neveux, tout ça, c'est mignon et tout... Et soit-disant, leur mère n'apprécierait pas. Tsss...



Et enfin, Enki qui m'empêche mesquinement de faire part de mon affection à ma cousine Eva...



A part ces quelques exceptions, les photos sont très réussies... Nous sommes même parvenus à prendre chacun des membres de la famille de manière à faire croire qu'ils étaient réveillés et qu'ils ont profité de la fête. Par exemple, la photo où on voit ma tante Huguette de dos, affalée dans mes bras, ça donne l'illusion qu'on est en train de danser... Gabriel la tête dans le gâteau, c'est pas mal non plus... Et Grand-Père en train de dormir paisiblement dans son fauteuil. De toutes façons, il dort tout le temps aux fêtes, alors...

Il ne reste plus qu'à les emmener dans leurs chambres, attendre leur réveil, leur dire que la soirée a été fabuleuse, leur filer les photos et prier pour qu'ils nous croient, sous peine d'être transformés en particules enflammées par l'ire de ma mère si elle s'aperçoit de la supercherie...

Ma vie est fabuleuse.

Ça a marché.

Aussi dingue que ça puisse paraître on a drogué à l’hydromel modifié tout un cortège de mariage composé presque uniquement de salamandres névrosées complètement fêlées. Et ça a marché.
On devrait avoir un prix du duo le plus suicidaire de toute la Thessalie pour ce coup là.

Je n’arrive pas à invoquer une belette entière, mais je conçois un plan machiavélique ; que Kaev, qui n’arrive pas à ouvrir une porte, réussit à exécuter.
Les dieux ont un sens de l’humour bien à eux quand même ou alors on est trop fort.


C’est donc au prix d’un effort considérable et après avoir grimacer toute la journée pour faire bonne figure envers mon ex-futur belle famille, que je me lève de ma chaise afin d’aider Kaev à tous les mettre au lit.

« Kaev vas y doucement avec la cousine.
- quoi ? C’est pour parfaire le mal de tête demain matin.
- ah ça il va être parfait c’est sur » dis je en le regardant tirer Eva par le pied dont la tête rebondit sur tout les marches.
J’empoigne au hasard Ténébra et le suis dans les couloirs.
- ça va durer encore combien de temps l’effet ?
- j’en sais rien pourquoi ?
- Ben comme ça on n’a pas besoin de dormir encore ensemble.
- pas faux. Mais si ma mère se réveille en pleine nuit, c’est pas prudent. Je pensais pas un jours dire ça mais… il vaut mieux qu’on dorme ensemble.
- RRRRRRRRRRRRRrrr !!!
- rhaaaaa ! Va me falloir boire pour oublier ça.
- en fait tu cherchais une excuse.
- parfaitement. Mais on l’a mérité.
- surtout moi.
- surtout moi ! C’est moi qui nous ai sorti de ce traquenard!
- un nouveau mot ?
- oui.
- comme quoi tout arrive. »

Le mariage ça change rien sauf que c’est pire après.

« Ta mère elle est pas du genre à chercher la petite bête si ?
-si.
- Genre demander le contrat de mariage ? Le carnet de famille, ce genre de trucs ?
- rrrrrrr.
- oui je sais tu détestes quand j’ai raison.
- pas faux. »

*calc*

« Tiens va poser ça sur notre table de nuit bien en évidence. Je m’occupe des autres.
- ok »

Je prends les papiers et me dirige vers la chambre.
« Enki-o-shaolante Maye’sa domicilié…blablabla… et Kaev Pyrus Naelat Wesley. Oh la vache ! Et après c’est moi qui est un nom à rallonge ?…nom de baptême…Kevin ? »

Ben celle là elle est pas mal tiens.

« KEVIIIIIIN !
- oui mam….ENKI ! »

Ça va barder.

J'avais complètement oublié ce détail.

Bien enfoui dans les tréfonds de ma mémoire sélective digne de l'oursin moyen (1), mon véritable prénom, qui n'est plus en usage depuis que je suis en âge de flamber la gueule de quiconque ose m'appeler ainsi, est l'un des fardeaux les plus lourds de mon existence. Disons qu'il est dans le top 2; avec Enki.

On a toujours eu des prénoms bizarres dans ma famille... Les autres Salamandres ont des noms terribles. J'avais des amis qui s'appelaient Maecron Griffes-de-Roc (2), Ivaar le Fort (3) ou Thariel Vive-Langue (4)...

Moi c'était Kévin le Voyou.

Je sais, ça donne vachement moins bien. C'est pour ça que, quand j'ai transformé en cendres mon premier professeur, j'ai décidé de changer de nom, et j'ai choisi Kaev... Ca donnait plus de panache (5).

Toujours est-il que je dépose avec application mon dernier paquet, à savoir ma mère, dans son lit, à côté de mon père, puis descend en trombe et me rue vers notre... ouch, rien qu'à l'écrire ça fait bizarre... vers... la chambre que je partage de manière occasionnelle et indépendante de ma volonté avec Enki.

Elle a prévu le coup, elle s'est glissée sous le lit. Sauf que...

"T'as grossi.
- Méheu, arrête avec ça! C'est pas cool de me parler de mon physique comme ça!
- Je ne te vanne pas.
- Oh?
- Je constate. Tu as essayé de fuir sous le lit, mais ton postérieur reste coincé à l'extérieur ; j'en déduis fort logiquement que son volume a augmenté entre la nuit passée, où tu pouvais aller consoler Jack sans problème, et le moment présent, qui intervient après que tu aies fini le gâteau de mariage pendant les photos...
- C'est même pas vrai! Et d'abord c'est pas mes fesses c'est la robe! On dirait une meringue, c'est rigide, ça passe pas, mais j'y suis pour rien!
- ...admettons (6).
- Pourquoi tu me parles de ça? Tu es fâché pour ton prénom?
- Devine.
- Et c'est pour ça que tu te venges avec tes vannes méchantes? grogne-t-elle en dégageant le haut de son corps de sous les lattes.
- Non. C'est juste que je comptais te chercher pendant quelques minutes dans la chambre avant de parvenir à te mettre la main dessus, mais comme tu m'as facilité le travail en ne réussissant pas à te cacher à cause de...
- Ma robe.
- ... c'est ça. J'ai donc préféré respecter mon planning et passer le temps que j'aurais passé à t'extraire de ta cachette à bavarder de choses et d'autres avec toi.
- C'est fort aimable.
- Le temps est écoulé. Je vais pouvoir passer à la partie vengeance brute. Et si tu oses me donner un ordre direct je transformes ta salle de bain à bulles et bougies en écurie. "

Je lève les doigts et la menace de les claquer. Elle ouvre la bouche, songe à sa "merveilleuse" salle de bain, la referme, soupire, résignée, et se rue vers la porte puis détale dans le couloir.

Je me lance immédiatement à sa poursuite, bien décidé à lui faire payer cette dernière fourberie. Chassez le naturel...

Enki commence à avoir du souffle, et nous parvenons au deuxième étage sans que je sois parvenu à la rattraper. On fait comme si elle me craignait et que j'avais envie de la frapper, mais en fait je crois qu'on s'amuse bien...

Même si je la frapperai quand même à la fin.

Et là, c'est le drame.

Mon grand-père, en pyjama à rayures, sort en baillant de la chambre dans laquelle je viens de le porter...

"Tiens, Kaev, mon grand, je me demandais où tu planquais tes réserves d'hydrom... Dis-moi, garnement, tu as une curieuse façon de célébrer ta nuit de noces... "

Liste des problèmes:

1. Mon grand-père ne semble pas être affecté durablement par mon somnifère (7).
2. Il semble bien décider à écluser mon stock d'hydromel.
3. A ses yeux, il semble de plus en plus évident qu'Enki est moi ne sommes pas à proprement parler des tourteraux fous amoureux l'un de l'autre.

On est mal...

____________
(1) HRP aussi, oui je sais...
(2) Il était super doué de ses griffes. Je crois que sa femme s'en est rendu compte quand il l'a coupé en deux, un soir de colère...
(3) Lui était capable de soulever sa femme sans effort. Et de la lancer loin, aussi. Mes potes ont rarement de grands affinités avec la gente féminine...
(4) Lui... Je ne dirais pas sa capacité pour ne pas choquer les bonnes moeurs. Il vous suffit de savoir qu'à l'inverse des autres, sa femme était très heureuse...
(5) Et les flics ont mis vachement plus de temps pour me retrouver...
(6) Les mecs, je vous file un tuyau: vanner une fille sur son poids ça va une fois, mais pas deux. Au deuxième coup de canon, battez en retraite.
(7) En même temps, quand on est vieux et qu'on passe son temps à dormir ou à maugréer contre le chat qui perd ses poils, les somnifères finissent par ne plus trop faire d'effets...

Je m’arrête dans un dérapage parfaitement contrôlé grâce à une statue stratégiquement placée.(1)

« Dis moi garnement, tu serais pas en train de me rouler ?
- mais, heu, pourquoi tu dis ça ?
- Ahah! J’étais comme toi à ton age ! Je me souviens quand j’ai épousé ta grand-mère…y’a fallut se coltiner toute la famille…
Oh la la, c’est pas gagné.
- ça a été la journée la pire de ma vie ! … enfin à part le jour où j’ai faillit me faire chopper dans le donjon lugubre du dessert de Smork par une vingtaines de gobelins armés jusqu’aux dents ils avait des gourdins énormes avec les clous et tout ! en ce temps là ils étaient fournis par le Comte des Maux Niaque, mais il a pris sa retraite maintenant, et j’ai bien faillit y rester dans ce donjon ! …heureusement que j’avais mangé des haricots rouges à la taverne du coin avant de partir...ah ! Dans le temps les haricots rouges n’étaient pas comme maintenant ils te dégageaient les tri…les…enfin bon. Qu’est ce que je disais ?
- vous parliez du jour de votre mariage.
- ah oui ! Un jour horrible ! Long comme ma…ma …hum, ma soif en ce moment. Tu as encore de l’hydromel ?
- Oui, Kaev doit bien en avoir une bouteille sous son oreiller .N’est pas chéri ?
- comment tu sais ça ?
- devine.
- Bien, bien allons la chercher pendant que nous discutons…de…de
- de votre mariage.
- ah oui ! Foutu journée… »

Et c’est ainsi que le grand-père part pour une énième quête : A la recherche de la cave perdue.

« Y’a qu’une chose qui a rattrapé cette journée pourrie. C’est la nuit. Bon sang ta grand-mère en ce temps là avait un sacré…
- heu grand- père, je ne crois pas que ce soit des choses à raconter devant Enki.
- ah ? dit il en me toisant. C’est vrai qu’elle avait l’air un peu farouche dans le couloir.
- moi ? Évidement ! J’allais tout de même pas …
-Enki…
- pas quoi ?
- pas…le laisser faire si facilement…faut bien le faire mariner un peu.
A boire vite. Je me meurs.
- ahahaha ! C’était donc un petit jeu pour te mettre en jambe garnement !
- heu...oui...Hahaha.
- Fallais le dire ! Beugle t’il en lui décochant un coups de coude dans les cotes. Haha marrant ça. Mais de mon temps on ne courait pas autant… »
L’ancêtre se remet en route vers la cave et j’en profite pour m’approcher de Kaev.
« C’est qui le génie ?
- tu ne là pas fais exprès.
- j’ai sauvé la situation. Encore. c’est qui le génie ?
- RRrrrrrr. Enki.
-Un peu plus fort, je n’ai pas bien entendu là.
- Enki. Et avant de rajouter quelque chose tu devrais penser que dans dix minutes on sera que tout les deux. Seuls.
- justement laisse moi savourer ce moment. »

Après plusieurs détours dans le palais confirmant l’intuition première qui est que le sens de l’orientation à sans doute une origine génétique, nous arrivons devant la cave.
Le grand –père entre sirote trois quatre bouteilles en prends cinq pour la route et ressort aussi sec en lançant un clin d’œil a Kaev.
« Laisse là ouverte va, on sais jamais, et je voudrait pas te déranger encore. Hahaha.Tu sais ça me rappel le jours où le vieux Goustan, tu sais celui qui tiens le stand de crêpes près du lac de feu ?
- heu non.
- mais si celui qui a perdu ces poils à cause de la malédiction de la cave du donjon de …»

C’est le moment ou jamais, je me glisse discrètement dans la cave chope une bouteille et la planque dans ma robe pendant que Kaev fouille sa mémoire de crevette cuite à la recherche d’un Goustan le pelé.

Il a raison le grand-père ce sont les nuits qui rattrapent les jours.



(1) c’est pour la rime.

Nous raccompagnons donc l'ancêtre jusqu'à sa chambre, où il pourra écluser en paix sa bibine. Pendant que je fais semblant de me rappeler d'un quelconque marchand de crèpes, mon grand-père continue sa tirade en m'abreuvant de ses glorieuses aventures passées... Quand il a volé la jambe de bois magique du chef des Hommes-Serpents, alors qu'il servait dans la légion étrangère, parmi les Morts-Mivants de la Pyramide de Xvor, entre autres. J'ai toujours eu du mal à imaginer l'utilité d'une jambe, même de bois, pour un serpent, mais je dois manquer de fantaisie, sans doute...

" ...et donc, les Hommes-Autruches nous encerclaient. J'avais avec moi un dernier bataillon de fidèles zombis, qui auraient lutté jusqu'à la mort s'ils n'étaient pas déjà défunts. Nous étions dans une position stratégique, mais ils avaient le nombre pour eux. Alors on a eu l'idée de génie: on a creusé des trous dans le sable, puis, pendant qu'ils nous chargeaient, les zombis ont commencé à balancer leurs yeux sur les arrière-trains de ces volailles... Par réflexe, ils ont tous enfoui la tête dans les trous! Mais au fond, on avait mis des pièges à loup! Ahahaha, on a bien rigolé...
- Génial comme plan...
- Je ne te le fais pas dire, ma belle...
- Est-ce que Kaev met la tête dans des trous parfois?
- Enki...
- Quoi? Je me renseigne, c'est innocent...
- Ahaha, non pas à ma connaissance... il va falloir trouver autre chose pour le forcer à vous donner un coup de main pour le ménage... Remarquez, si on considère les toilettes comme un trou, sa cousine Eva peut...
- Papy-euh!
- Ah, nous voilà arrivés... Allez, bonne nuit les tourteraux... Et ne le faites pas trop courir, jeune peronnelle, il ne vaudra plus rien s'il est épuisé...
- Déjà que...
- Enki.
- ...bonne nuit Grand-Père.
- Bonne nuit Papy. "

La porte se referme. Ouf.

"Enki, donne moi cette bouteille.
- Hein? Mais quelle bouteille?
- Me prends pas pour une bille, tu sera gentille.
- Je ne vois pas de quoi tu... Kaevéteinscettebouledefeuordredirect!
- Même pas drôle. N'empêche que, file moi cette bouteille.
- Pourquoi? T'as dit que j'avais le droit d'aller dans la cave maintenant!
- Parce que vu la journée qu'on vient de passer, tu vas encore me faire un alcool triste et j'ai pas envie que tu te mouches sur mes écailles en hurlant ton désespoir comme la dernière fois.
- ...j'ai fait ça moi?
- Je suis content pour toi que tu ne t'en souviennes plus, je crois que tu te serais déjà pendue, de honte...
- Oh mon dieu...
- Allez, file-moi cette bouteille.
- Tiens, la voilà.
- Sage décision. Je te la rends quand ils seront tous partis, si tu es sage.
- T'abuses n'empêche, de me foutre la honte pour m'empêcher de boire...
- Mais non voyons... Je prends garde à tes précieuses circonvolutions cérébrales, ce serait dommage que l'alcool endommage ton cortex surdéveloppé de génie...
- C'est vrai?
- Non. "

Je retourne dans la chambre, suivi par une Enki boudeuse, et entreprend de remplir les papiers.

"Lieu de naissance... Je mets "cendres"?
- Ecole de magie du Poussin Arthritique, Cinq Royaumes. Andouille.
- D'accord. Profession... Chieuse?
- Mage.
- Mouahahaha...
- Ecris.
- Oui mon amour... Hihihi... hum... Nom du père?
- Munstrum.
- Ca veut dire "potentiel génétique défaillant et inadapté à toute tentative d'obtenir une descendance potable"?
- Ca veut dire "archimage de niveau 38 capable d'envoyer d'un claquement de doigts une salamandre trop bavarde se perdre dans les plans".
- ...avec sa fille qui a auparavant crâmé sa propre maison?
- C'est son deuxième prénom.
- C'est ça... Date de naissance?
- Le jour précédent la mi-lune du mois où le soleil achève de faire mûrir les melons...
- Le 14 août quoi.
- ...ouais.
- Quelle année?
- Chais plus, c'est trop loin, je m'en souviens pas.
- Disons 4802 après JC? (1)
- Tu rigoles, ça me ferait... euh... vingt-neuf ans!
- Et alors?
- Alors j'en ai même pas vingt!
- Bah, pour quelques années... Ca aurait été un siècle, encore...
- Un humain ça ne vit même pas cent ans.
- Redis-le, ça sonne comme une musique à mon oreille.
- Va mourir.
- Toi d'abord. Mouahahaha...
- Bref. Mets 4793, à peu près.
- D'ac. Animal totem?
- Hein?
- C'est la règlementation chez les Salamandres. Chacun a un animal totem, qui le représente et tout...
- Ah... Ben j'en sais rien, j'y ai jamais réfléchi...
- Je mets "poule", ça ira bien.
- Hé!
- Gniark.
- Je suis sur que toi c'est "blaireau".
- Comment tu le sais?
- ... "

Ca s'annonce prometteur, cette paperasse...

__________
(1) Jean Charles. C'est le nom du gars qui a inventé le calendrier qui a cours dans la plupart des plans.

Courage.

« Ensuite ?
- signe distinctif.
- non mais vraiment…et ah quoi ça sert ?
- pour pouvoir t’identifier si je te crame au 72éme degrés.
- ben voyons.
- c’est vrai, maintenant qu’on est mariés…
- Kaev.
-…censés être marié si je te brûle c’est plus un crime en fait…
- Quoi ? C’est quoi alors ?
- un geste pour l’humanité…
- très drôle.
- bon alors ?
- j’ai 31 dents.
- quoi ?
- tu veux un signe distinctif je t’en file un.
- mais pourquoi 31 ?
- y’en a une qui a jamais poussée.
- ouais…d’un autre côté si on doit consigner la–dedans tout ce qui n’a jamais poussé en toi on va y passer la nuit.
- c’est bas c’est très bas.
-merci. »

Vivement demain.
Demain tout sera fini. Plus besoin de jouer la belle –fille , de dormir dans le même pieu, d’être a jeun, de sourire, de l’appeler chéri, … de supporter sa famille.
Demain je reprends les bonnes habitudes ! Youhou !

« Du calme.
-quoi ?
- je sais pas à quoi tu penses mais tu jubiles…alors du calme. »

En attendant ce divin moment…il faut encore survivre à cette nuit et se coltiner Kaev.
Et ça va être dur… et long. (1)

« Tu as écrit quoi là ?
-c’est rien c’est le contrat de mariage.
- laisse moi lire.
- laisse tomber.
- t’as peut être pas remarqué mais c’était un ordre direct.
- ca valait le coup d'essayer.
- certes. »

Je prends le document écrit en patte de mouche…
« Moi Kaev, assure qu’en cas de décès accidentel de mon épouse…j’imagine même pas la tête de l’accident… une vengeance en bon et du forme sera accomplie … c’est ton rayon ça… et ce afin que l’âme de ma chaière et tendre repose en paix…ben tiens. Elle est bien bonne. Envers son père. Envers mon père ?
- ben quoi ? Tu devrais être flattée !
- alors là j’ai bien envie de mourir rien que pour te voir essayer de faire ça.
- tu doutes de mes capacités ?
- du tout. Pour le cassage de nez tu es très fort. Par contre, contre un archimage niveau 38 qui attends ton retour et qui se doute que tu seras pas de bon poil…
- hum…
- t’as des poils ?
- Ne reviens pas là dessus. »

Je me marre.

« Mais ça me rassure.
- de quoi ?
- j’ai vraiment cru que tu allais faire un truc dans mon intérêt.
- mouhahaha !
- je te le fait pas dire ».

Les choses commencent à rentrer dans l’ordre.





(1) la nuit. Merci de suivre.

Foutue paperasse.

"Ah au fait, faut que tu écrives une promesse de fidélité éternelle, pour le contrat de mariage.
- Que je quoi?
- T'as très bien compris. Une promesse du genre "j'aimerais mon époux jusqu'à ce que la fin du monde nous sépare, je lui ferai ses petits plats amoureusement et je les lui apporterai sagement, comme une femme se doit de le faire", etc...
- Non mais tu rêves, tu me prends pour ta bonne ou quoi?
- Je te demande pas de le faire, je te demande de l'écrire.
- Ah bon...
- De toutes façons vu ta manière de cuisiner je préfèrerais bouffer les cadavres de Dakryk que ta tambouille...
- Merci...
- Et pour ce qui est de me les apporter sagement, vu tes pieds et tes mains gauches (1), tu flanquerais tout par terre, alors bon... Vaut mieux que ça ne reste que des mots.
- C'est ma fête ce soir?
- Parle pas de malheur...
- Bon, j'écris quoi alors?
- J'en sais rien, c'est des trucs de fille ça...
- Ah, les trucs de mecs c'est promettre de pourrir la gueule des mecs qui touchent à leurs copines?
- Ben oui.
- Et les trucs de filles c'est attendre connement à la maison en faisant le ménage et la cuisine?
- Pas la cuisine. Pas toi. Mais sinon dans l'ensemble c'est ça.
- "Je jure d'attendre éternellement et connement emmurée en haut d'une tour que mon époux fidèle et aimant me revienne, et tout en brodant des tapisseries hideuses et en brâmant des chansons d'amour pathétiques, qu'il soit allé pourfendre moult dragons ou qu'il soit simplement allé boire un pot à la taverne du coin". Ca te va?
- Admettons.
- Heureusement qu'on ne sera jamais mariés dis donc.
- Tu l'as dit. Rien qu'à l'idée de t'entendre chanter en m'attendant...
- Je parlais du côté prodigieusement sexiste du mariage dans ton peuple.
- Ah... M'aurait étonné aussi. M'enfin c'est des traditions tout ça, ça n'a plus trop court maintenant mais bon, vu que changer les traditions c'est du boulot de fonctionnaire...
- Ben qu'est-ce qu'ils attendent pour changer ces trucs débiles?
- La fin de la grève.
- Quelle grève?
- Celle qui dure depuis une douzaine de siècles, maintenant... Ils militent contre la réduction de leur pause café.
- Oh?
- Ouais, ils jugent qu'une pause de treize heures c'est trop court...
- Ah.
- Bon, la paperasse c'est réglé...
- Cool, je commençais à avoir sommeil... Vu la journée qu'on a passée aussi...
- Certes. Bon, dors bien...
- Tu ne dors pas avec moi?
- Efface ce sourire réjoui de ton visage.
- Pardon.
- Je vais promener Poutchou dehors. En attendant tu vas pouvoir t'endormir, te relever trois fois pour aller aux latrines et avec du bol, quand je reviendrai tu dormiras profondément...
- D'ac.
- Et si tu as pris toute la couverture quand je reviens ça va aller mal.
- D'ac. "

Je m'esquive et vais respirer l'air frais, en compagnie de Poutchou qui s'éclate parmi le champ de plantes carnivores qui borde le palais. Après deux heures de relargages de spores divers, je vais m'écrouler à côté d'Enki qui dort paisiblement, et plonge dans le sommeil.

Deux minutes plus tard, Enki veut aller aux latrines pour la quatrième fois.

Bon prince, je la laisse passer, et me rendors comme une masse. Je ne l'entends même pas revenir (2), et finis ma nuit en restant, une fois n'est pas coutume, obstinément endormi.

Et enfin, le soleil se lève sur la dernière journée où nous devrons jouer cette satanée comédie.

Enfin, ça c'est Enki qui me le tonitrue en écartant brusquement les rideaux à sept heures du mat et en m'inondant de lumière, et en me demandant si j'ai bien fait la grasse mat.

Je vais me pendre.

Non, mieux... Je vais LA pendre.
_____________
(1) Et elle est droitière
(2) Et pourtant, Enki qui se lève la nuit, c'est un événement à peu près aussi discret qu'un poids lourd qui se cache parmi les trèfles. HRP... sans commentaire.

« Rhaaaaaaa ! »

Il râle, signe qu’il va bien. Dommage.

Je me penche par la fenêtre pour entendre le doux gazouillis des oiseaux, sentir l’air frais du matin (1), voir le soleil dans sa majestueuse…
« Oh ! Y’a quelqu’un dehors !
- manquais plus que ça.
- je m’en occupe !
- de mieux en mieux. »

Je sors en trombe de la chambre et dévale les escaliers super doucement pour pas réveiller la pas belle famille. Après tout, plus ils dorment moins on doit les supporter.

J’ouvre la porte du placard pour dénicher le dernier des serviteurs (2) et après quelques menaces mettant en jeu une pelle, un trombone et la mère de Kaev il accepte de me suivre jusqu'à la porte de la DT.

C’est donc épuisée d’avoir couru sur 20 mètres que je me retrouve face à un type épuisé d’avoir couru des kilomètres.

« Hé salut !
- ‘lut.
- tu fais quoi ?
- cherche une forêt.
- ah, y’en à pas je crois dans le coin. Elles sont toute parties quand Kaev est arrivé.
- Ah. Gwalin est dans le coin ?
- oh vous êtes un ami du nain ?
- Ouais.
- ah. T’es tout seul ?
- non, j’ai une horde d’ennemis sanguinaires à mes trousses.
- ah ok. Ben entre alors. »

Ah ah ! Je vais sauver quelqu’un ! Et on m’appellera la grande Enki la sauveuse !
Et on dressera des temples avec des statues à mon effigie dans toute la Thessalie !
Et on chantera des chants super beaux pendant que…

« ENKI ! »
Pendant que Kaev sera en train de me hurler dessus pour une raison ou une autre.
« Ouais ?
- c’est qui ?
- Seigneur Fougère…
- holà.
- Je suis un ami de Maître Gwalin.
- bon sang.
- Je cherche la forêt dans laquelle je pourrais trouver la paix.
- ça va saigner.
- une corde. Me faut une corde.
- heu. Hum. Antoine tu veux bien conduire notre…invité dans une chambre libre. Merci
- Un elfe ?
- demi elfe je crois.
- Fougère ?
- heu oui. je sens que ça lui arrache la gorge rien de prononcer ce nom...
- Enki.
- ah je savais que tu serais indulgent. Apres tout on ne pouvait pas le laisser dehors tout seul, là devant. C’est un ami de Gwal et en plus il est poursuivit par des ennemis sanguinaires.
- des ennemis…
- certes.
- qui l’on suivit.
- certes.
- jusqu’ici.
- sûrement. »

Je sais pas pourquoi mais je sens que j’ai fait une petite bourde.

« Genre baraqués ? Et en surnombre les ennemis ?
- probable.
- genre à réclamer la tête du type devant les portes de la DT en piétinant mes plans de plantes carnivores ?
- Comment tu sais ?
- ils sont devant.
- Ah, d’accord.
Bien, bien, bien. Il est temps de trouver une issue de secours.
- Je te trouve étrangement calme.
- ça ne va pas durer.
- Je me disais aussi. Heu…je vais aller voir si ta famille est réveillée ok ? »

Un seul mot d’ordre : courir. Sans se retourner. Quoi qu’il advienne. Jusqu'à ce planquer derrière un truc plus gros que Kaev. Sa mère ! Taïaut !

« ENKI ! »





(1) et aérer la chambre par la même occasion avant de mourir asphyxiée dans d’atroces souffrances.
(2) ça pourrait faire un bon titre de film tiens.

Alors là je crois qu'on a atteint des sommets.

Mon invocatrice, qui est accessoirement la personne que je hais le plus au monde, et qui est sensée, devant ma famille quasi-entière qui squatte les chambres de MON palais, être ma femme douce et aimante et la future mère de mes enfants; vient d'accueillir sous mon toit... Je le fais en deux étapes, ça sera peut-être moins dur à assimiler.

Elle a donc porté assistance à:

1. Un Elfe
2. qui a un nom de plante.

Non, ça passe vraiment pas.

Et en plus d'avoir fait la bourde la plus monumentale de son existence depuis... oh, au moins cinq bonnes minutes (1), mademoiselle a décidé de se carapater en me laissant, comme d'hab, tout le travail. (2)

L'Elfe a suivi le serviteur (3) et s'est esquivé avec célérité avant que je ne le pulvérise. Et donc je me retrouve dans les couloirs, seuls, avec à ma fenêtre un tas de gens qui veulent la peau de l'Elfe et qui piétinent ignominieusement mes plantes.

Ca va saigner, c'est moi qui vous le dit.

A grandes enjambées (4) je me dirige vers le tas malpropre de soldats diversement metalliques.

"Salutations, ô révéré chef de la Delirium T...
- Savez pas lire?
- Uh?
- Là, en gros, y'a écrit "ne pas marcher sur les plantes".
- Certes, mais...
- Et devinez ce que font actuellement vos hommes, chevaux et machines de guerre?
- Nous...
- Ils marchent sur mes plantes, bingo, vous voyez que vous le savez? Alors vous allez décarrer de là en vitesse avant que je ne décide de devenir désagréable!
- Désagréable comme...
- Comme mettre à feu et à sang indifféremment vos royaumes, soldats et faces jusqu'à ce que vous appreniez la lecture et/ou les bonnes manières!!
- VINGT PAS EN ARRIERE!! A MON COMMANDEMENT! UNE, DEUX! "

Donc ça, c'est fait.

"Je suppose que vous venez pour l'Elfe. J'aurais été disposé à vous le refiler, mais il a obtenu l'asile chez nous, et c'est un ami d'un de mes membres, alors je vous suggère de prendre vos cliques et vos claques et de nous laisser régler ça en famille, vu?
- Mais...
- VU?
- Je...
- C'est la dernière fois que je dis "vu", après vous ne pourrez de toutes façons plus rien voir. "

Je fais apparaître une sphère de feu noir dans ma paume, et aux yeux du commandant des troupes, je crois qu'il a compris le message.

En rentrant, je trouve le palais en effervescence.

Enfin, ma famille en effervensence, disons. Parce que dans le palais, les serviteurs d'Enki sont à la limite de l'inexistence, et les miens ont de toutes façons pour ordre de rester très loin de ma famille.

"Ben, vous partez déjà?
- Eh oui mon chéri, déjà! Enki nous a montré vos photos de mariage, c'était une soirée très réussie! Dommage que je ne m'en souvienne pas très bien... Et Papy nous a raconté un bout de votre nuit de noce... c'était... original.
- Ah ça...
- Bref, on va y aller nous, on va vous laisser travailler!
- Ah... Bon, au revoir maman...
- Au revoir mon chéri... Je suis si fière de toi, si tu savais!
- Y'a vraiment pas de quoi...
- Quoi?
- Non, j'ai dit... prends bien soin de toi...
- Ah. Bon, amusez-vous bien les tourteraux! "

Et ma famille entière de s'engouffrer dans un immense portail bleu ciel qu'ils ont ouvert en plein milieu du couloir. Je leur fait "au revoir" de la main, sauf à Eva, bien sur (5).

Enki arrive sur la pointe des pieds, le cou rentré dans les épaules, et sans nous regarder, entamons un dialogue dont nous avons le secret, tout en observant le portail qui m'amenuise.

"Tu m'en veux?
- Oui.
- Beaucoup?
- Oui.
- Je te jure que ça partait d'une bonne intention!
- C'est bien ça le problème.
- Tout le monde ne peut pas être méchant comme toi!
- Si.
- Le pauvre, il aurait été tué par tous ces gens!
- Tu lui as demandé pourquoi il était poursuivi?
- Euh... non.
- Tu as réfléchi en te demandant si par hasard ce n'était pas un assassin ou un traître de guerre?
- Non... J'ai pas pensé à...
- C'est bien ça le problème.
- Oh ça va! C'est un Anathoï, c'est toi qui voulait une grande alliance!
- Oui mais... un Elfe...
- Et alors?
- Il s'appelle Fougère.
- Ouais bon. On va s'en sortir, hein?
- De toutes façons on s'en sort toujours.
- Certes.
- Des fois j'aimerais bien mourir, au lieu de m'en sortir et voir toujours ta tête...
- Oh! C'est pas cool!
- En effet.
- ...
- ...
- Kaev?
- Oui?
- Le portail?
- Quoi?
- On pourrait pas l'utiliser et aller chez toi, puis de là demander à quelqu'un que tu connais d'en ouvrir un pour moi jusqu'à chez mon père?
- Pas con.
- Kaev?
- Quoi?
- Le portail s'est déjà refermé.
- Je sais.
- Tu prends ça super bien. Après tout on vient de louper une occasion en or de repartir chez nous et...
- RHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAa!!!
- ...je me disais aussi. "


__________
(1) Réveiller une Salamandre aux aurores EST une bourde monumentale.
(2) Et HRP... Non je suis vil, là c'est plutôt moi qui lui refourgue le taf...
(3) Je me souvenais plus qu'il lui en restait encore... Va falloir arranger ça.
(4) Oui, pour traverser un tapis de plantes carnivores voraces et agressives, mieux vaut être capable de faire de grandes enjambées.
(5) Pour elle ma main se replie et ne laisse en l'air que le majeur... Coutume de chez moi.

Tout va bien, tout rentre dans l’ordre.

A deux trois détails prés…puisque nous venons de rater une fois de plus la chance de repartir chez nous. Comme d’hab quoi.

Mais bon je suppose que c’était trop facile de passer un portail tout bête et de se retrouver à la maison, au chaud, tranquille, avec des chaussons ridicules aux pieds.

C’est bien plus palpitant d’être là, à attendre que Kaev me regarde les yeux injectés de sang dans l’espoir (1) de me broyer le nez pour bien me faire comprendre que tout est de ma faute et que je suis le pire mage de la galaxie. (2)

Je me demande ce qu’on nous prépare encore en haut comme joies dans la vie.
Qu’on m’achève. Vite.

Non Enki, il faut voir le côté positif…cherche bien.

Nous avons un nouvel Anathois tout frais sorti de derrière les fagots… tout équipé, avec le chapeau, la horde d’ennemi, l’arc et tout !
On n’est pas marié!
On a viré la famille!
Il reste plein d’hydromel !
J’ai accès illimité à la cave !
Super.

Mais avant de se noyer dans les profondeurs abyssales de l’hydromel il faut affronter le courroux du terrible lézard, (3) qui d’un instant à l’autre va émerger de sa torpeur dans laquelle la fermeture de l’unique moyen qu’il avait de se débarrasser de moi la si cruellement jeté. (4)

Démarrage de compte à rebours : 5, 4, 3…2…1…courrez !

« Tu es encore là toi ?
- oui, j’allais à l’instant me mettre a courir.
- pourquoi tu ne le fais pas ?
- je reste stupéfaite par le calme de ta voix.
- c’est parce contre toute attente on s’en ai pas mal sortis.
- ah ouais ! Et tu te dis que c’est grâce à moi et que pour ça tu ne vas pas m’épargner !
- non. Ne rêve pas.
- tu m’invites au Mc ?
- Non mais soit réaliste !
- tu me tapes et tu m’emmènes à la cave pour oublier.
- tu vois quand tu veux.
- mouais »

Bon, recule stratégique, s’agit pas de rester moisir…
« Enki ?
…dans les parages…
- ouais ?
- j’ai une lettre pour vous.
- et pourquoi tes larbins ne m’appels pas Déesse ?
- pas fous.
- ouais mais Enki ça fait un peu…
- naze ?
- ouais.
- tant mieux. C’est quoi cette lettre ? »

Je ravale une réplique acerbe dont j’ai le secret. (5) et décachette la lettre.

« Ma déesse,
- menteur.
- rhaaaa mais c’est fini oui ?
- continus que je me marre.
- c’est le désespoir qui m’accompagne depuis que j’ai était privé de votre présence.
- il ment et il fait des fautes.
- … Mon paradis prenait forme dans vos yeux, désormais je ne contemple que le vide…
- ah elle est bien bonne c’est qui l’artiste ?
- …Ce n’est que l’espoir de vous revoir qui me maintient en vie…Kaev arrêtes de rire.»




(1) espoir tout a fait à sa portée en fait.
(2) inter plans, aussi oui.
(3) patapéheu !
(4) traduction pour les esprits lents : ça va saigner.
(5) c’est ça rigole…

Faut lui reconnaître ça, à ce fou suicidaire et inconscient, il a un certain style. (1)

"Kaev arrête de rire c'est dans la lettre? Il te connaît bien...
- Non c'était un ordre direct. La ferme.
- Ouh que me voilà fort meurtri par de si cruelles paroles... La douce demoiselle se voit-elle déjà protégée de mon courroux par son mystérieux amant?
- Tu veux pas arrêter de te foutre de moi cinq minutes?
- Que de sérieux... Tu encaisses le choc, ça va?
- Kaev ça suffit.
- Tu veux un remontant pour te remettre de ces émotions?
- Je vais te... Ah ben en fait, si tu le proposes si gentiment, va donc me chercher une bouteille à la cave.
- Y'a pas écrit bobonne ici.
- Non mais c'était aussi un ordre direct.
- Je trouves que tu commences à abuser de ces ordres directs.
- Certes. Mais c'est tellement bon. Allez, va, fidèle serviteur...
- Je connais une magicienne qui va pas se remettre de voir son bain à bulles transformé en piscine de lave...
- Ouais bon... Et si je dis merci d'aller me chercher une bouteille à la cave, que j'ajoute que ce serait super cool de ta part et que je te promets de pas trop mettre de sang partout quand tu me taperas? Ca va là?
- Admettons. Mais pourquoi tu veux que je te tapes? Tu me prends pour une brute ou quoi?
- Déjà, oui... Et ensuite parce que quand tu es contrarié, tu te défoules sur moi... Si si, j'ai bien vu que ça te relaxais de me défoncer la cloison nasale à intervalle régulier...
- Mouais...
- Et j'ai aussi constaté que tu étais vachement exclusif... (2) Pour te détendre y'a que moi que tu tapes.
- Pas faux.
- Dis-le que je suis une invocatrice adorable et à ton écoute!
- Rêve pas.
- C'était un ordre dir... Enlève tes mains de tes... euh... oreilles?
- Je file sur le champ quérir votre nectar, gracieuse maîtresse, vous laissant lire et relire avec satisfaction les mots tendres couchés sur le parchemin par ce psychonévrosé en puiss... ce galant gentleman... "

Et hop, esquive. Tout plutôt que l'humiliation de dire du bien d'Enki, ordre ou pas.

N'empêche, un type à qui Enki manque... Ca doit être son contrôleur d'impôts, ou un truc du genre.

Je récupère une bouteille et me dirige vers la salle du trône.

Un quart d'heure et un kilomètre six de trajet pour une distance de douze mètres (3), j'arrive aux abords de la pièce en question. A l'intérieur, cortège de voix pépiantes. J'aime pas ça, ça fleure le mauvais coup. Je pénètre brusquement dans la salle devant Enki. (4)

"C'est qui ces types?
- Euh... des gens... à qui je confie une mission...
- Laisse moi deviner... Les gars en noir, c'est des détectives pour rechercher l'origine de ta miraculeuse missive. Les scribes c'est pour tenter de pallier à ton style littéraire de méduse morte. Et l'encadreur, là dans le coin, c'est pour faire de ce trophée inespéré une relique que toi comme tes fidèles allez vénérer jusqu'à la fin des temps...
- ...
- Ouais, quand tu rougis comme ça c'est que j'ai bon.
- Eh oh, ça va! Moi au moins j'ai reçu une carte pour la Saint Valentin!
- La quoi?
- Tu connais pas?
- Non.
- Normal remarque, vu tes relations avec les femmes...
- Tu comptes comme une femme?
- Fais pas le malin ou mon prochain ordre direct comprendra ta langue, des latrines et un tablier rose.
- Mouahaha. Bref, c'est quoi la Saint Valentin? "

Elle lève les yeux au ciel, comme si elle réfléchissait à la manière de me présenter ça. Vu qu'elle a l'air d'apprécier, ça doit être gluant de bons sentiments à souhait...

__________
(1) Explication de mon esprit tordu: ceci était donc un compliment HRP à Enki, puisque c'est elle qui a écrit cette lettre. HRP. Voilà quoi. Bref, ok, faites comme si j'avais rien dit.
(2) Et à côté de HRP, c'est rien...
(3) blablabla sens de l'orientation blablabla...
(4) Et non pas l'inverse... sans commentaire.

Comment expliquer la notion de romantisme à une salamandre, et qui plus quand c’est Kaev.
Ca va me prendre la nuit. (1) Va falloir faire simple. Très simple.

« La saint Valentin c’est LE jour de l’année où les gens se disent je t’aime.
- Ah. Les autres jours c’est interdit.
Ça s’annonce hard.
- Nan, mais ce jour là c’est symbolique.
- Symbolique de quoi ?
- De l’attachement mutuel. (2)
- Pour ça vaut mieux des menottes.
- Quoi ?
-Mouhahaha. Laisse tomber. Donc en fait c’est un jour comme un autre à part que ce jour là quant on dit une connerie c’est symbole d’attachement.
Ami de la poésie bonsoir.
- Heu, oui. C’est sur vu comme ça… Et y’a aussi les cadeaux !
- aïe.
- Il est de bon ton d’offrir à l’être aimé des fleurs et des chocolats.
- Des chocolats. Pour que trois jours après la greluche pique une crise pour le kilo pris au mauvais endroit.
- Mais non !
- Non ?
- Bon d’accord. C’est pas faux. Mais c’est romantique.
- Romantique c’est passer sa journée à courir les magasins en compagnie de couillons dans le même cas que nous dans l’espoir de dégoter une boite de chocolats pas trop degeu pour l’offrir à une fille qui pourra alors nous faire légitimement une scène, parce que de toute façon tout est de notre faute.
Il apprend vite.
- Vu comme ça.
- Je me trompe ?
-…non.
- Bien. Et il arrive quoi au pauvre bougre qui rate la date ?
- Malheur.
- Je me disais. Et c’est qui le naze à avoir inventé un trucs pareil ?
- Un fleuriste.
- Sans commentaire. »

Ca donne à réfléchir.
Il a l’art et la manière de démonter les clichés. (3)

«- Je suis bien content de pas être romantique.
- N’empêche que j’ai eu une lettre moi !
- Mais pas de chocolats.
- Non.
- Ni de fleurs.
-…Non.
- juste un bout de papier.
- …Oui.
- Mouahaha.
- t’es méchant.
- Arrête je vais rougir. »

Pourquoi ai-je la désagréable impression qu’il a marqué un point ?

Je m’approche de l’encadrement tout neuf accroché derrière le mur du trône.
Y’a même une trace de doigt. Il aurait pu faire un effort quand même.
Même pas signé.
Avec plein de fautes. (4)

« Mouais. Bon on arrête là, tout le monde dehors !
- Mais déesse… »

Je me retourne vers Kaev hilare.

Il est temps de sortir dignement. La tête haute, les épaules droites.
Direction les cuisines.
A mort les hommes, vive le nutella.





(1) pour lui expliquer avec des mots que ce soit bien clair.
(2) comme c’est bien dis…non ?
(3) RP. Ça va je plaisante…
(4) oui bon ça va hein !

C'est vraiment étrange les humains.

Un jour pour se dire je t'aime, les autres pour se haïr en paix...

Un jour des amoureux? Bah, pourquoi pas... On fête bien les femmes. Une fois par an, pour qu'elles nous foutent la paix avec la parité le reste de l'année... Là je suppose que c'est pareil: le mâle sort sa pouffe une soirée, histoire de marquer le coup, et se dit qu'il a fait sa BA de l'année et qu'il peut retourner regarder le F.O.O.T.B.A.L.L. (1) jusqu'à l'année prochaine.

Et je suis sur qu'il a l'air franchement étonné quand la demoiselle en question décide d'aller trouver une histoire autrement plus passionnée que la tendre demande du mâle d'aller lui chercher une bière dans le frigo.

C'est le problème de faire comme tout le monde: on finit par ne plus être capable de surprise.

Cette histoire de fête des amoureux me semble quand même une grosse hypocrisie... Dire je t'aime un jour, parce que tout le monde le fait? Pourquoi pas... Pendant la fête des femmes, on fait comme si elles étaient nos égales (2), et le reste de l'année y'en a pas une qui bronche lorsqu'on leur tient la porte ou qu'on leur propose de porter de lourdes charges pour leurs beaux yeux... Et pourtant, quoi de plus absurde que la galanterie, dans un monde soit-disant de parité...?

Les humains devraient arrêter de créer des fêtes. Déjà qu'ils ont des idées idiotes en temps normal... Alors entre le bonhomme qui livre les cadeaux par la cheminée, la fête de l'année qui nous rapproche du trépas et cette fête des amoureux...

Je sais pas qui crée ces fêtes, mais je pense qu'on devrait l'interner...

Quoi qu'il en soit, Enki sort dignement de la salle, les mâchoires crispées. Je suppose qu'elle va se venger lamentablement de mes commentaires sur le nutella.

Pas de bol, je l'ai fini. Je crois qu'elle va hurler.

"KAAAAAEEEEEEEEEVVVVV!!! (3) "

Qu'est-ce que je disais?

"J'arrive maîtresse vénérée...
- Bouge! "

Est-il besoin de rappeler qu'une femme privée de nutella représente un danger comparable au lion blessé nourri au yaourt depuis une semaine?

Même Enki.

"Alors?? Tu viens oui??
- Oh, zut alors, me suis encore perdu-euh! "

Ce qui est rigoureusement faux, le chemin vers la cuisine est le seul que j'ai fini par apprendre par coeur.

"Les flèches noires!
- Tu as changé les couleurs?
- Ouais... Quand on a une Salamandre daltonienne, vaut mieux utiliser des couleurs faciles à reconnaître...
- J'arrive...
- Dépêche-toi ou je te mords!
- Je n'attends que ça... (4) "

Non pas que j'aie la moindre appréhension quant à ma rencontre avec une furie ivre de rage et assoiffée de sang... Non parce qu'une femme qui manque de cacao ça ressemble à ça... C'est juste que j'adore l'embêter.

"Tu arrives ou il faut que je vienne te chercher?
- J'arriveuh!
- T'es aussi lent que.. que...
- Que toi à sortir de la salle de bain?
- OH!! Viens ici immédiatement!
- C'est un peu ce que j'essaie de faire depuis tout à l'heure, au cas où tu ne l'aurais pas remarqué...
- Ordre direct, je te veux devant moi dans dix secondes! "

Alors ça c'est fourbe.

"Alors?
- Tu l'auras voulu... "

Je ferme les yeux et concentre les ondes mystiques pour repérer la position de mon invocatrice... Plein nord. Je marmonne une vague incantation, nimbe mes poings de flammes et me rue sur le mur d'en face.

*BROUM*
*CRAC*
*KRASH*
*BOUM*
*KRRRR*
*VLAM*
*AAAAAAAH!!! *

"Huit secondes vingt-sept.
- T'as défoncé... euh... quatre cloisons!
- Certes. C'était ton ordre.
- Je suis sur que tu as fait exprès de passer par ma salle de bain et de fracasser ma baignoire.
- Mwa?
- Tu fais très mal l'innocent.
- Je sais. "

__________________
(1) Formidable Occupation Oisive Typique du Boulet Atrophié de la Libido et Lobotomisé.
(2) "Je conviendrais volontiers que les femmes sont supérieures aux hommes, rien que pour les dissuader de se croire nos égales". S. Guitry
(3) Je sais, d'habitude quand on crie on ne double pas les consonnes... Mais là c'est Enki qui crie, alors bon...
(4) La voir s'attaquer avec ses petites dents à des écailles dures comme l'acier, ça doit être un spectacle palpitant... Et HRP j'adore ça aussi, par ailleurs...

Je le déteste. Mais ça je l’ai déjà dis, c’est notoire désormais.

Je m’assoie à table en regardant d’un œil morne le reste du mur se consumer et Kaev se poser en face de moi.

« Tu as vu comme je reste calme ?
- pas faux.
- l’habitude j’imagine.
- sûrement.
- encore trois mois avec toi et je suis bonne à enfermer.
- trois mois ? Pas avant?
- Kaev.
- même si je mets les bouchées doubles ?
- Kaev.
- dommage. »

Je le hais.
Oui, je sais je l’ai déjà dis mais ce fait du bien de le redire.
Je le hais. Il viens de défoncer ma baignoire et de…
« Tu as vidé mon pot de nutella ?
- oui.
- en entier ?
-oui.
- sans en racheter ? (1)
- oui.
- tu es fourbe.
- je m’assume. (2) »

*clac*

« Passe moi le pain.
- le mot magique ?
-ordre direct.
- alors ça… »

Pan dans les dents.
Début du match : Enki 1 – Kaev 0
J’aime quand je gagne.

J’entame le tartinage (3) d’une moitié de baguette à l’aide d’une pleine cuillère de nutella. (4)
« Tu vas faire quoi pour retrouver ton preux chevalier alors ?
- Rien.
-oh, si j’étais toi, je chercherai partout.
- pourquoi ?
- parce que quelqu’un qui veux de toi c’est assez rare pour le chercher. »

Enki 1 – Kaev 1
Je déteste quand je perds.

« D’un autre côté ça me sera arrivé au moins une fois…c’est pas le cas de tout le monde.
Enki 2 – Kaev1
- Dommage tu aurais pu te marier.
-sans façon merci, j’ai vu ce que ça pouvait donner.
- pas faux.
- Et puis de toute façon s’il veut de moi il viendra me chercher.
- abuse pas il est peut être pas suicidaire à ce point. »

Enki 2 – Kaev 2.
Balle au centre.





(1) fais universel chez les hommes. Ils ne savent pas racheter un truc avant de le finir.
(2) Kaev assume toujours tout. Surtout Hrp.
(3) un nouveau mot oui c’est mot qui écrit d’abord !
(4) cuillère oui, pas couteau, parce que déjà c’est moins drôle, en plus pour lécher le nutella à la fin le couteau ça coupe, et quant on tartine le nutella sur une crêpe avec un couteau ça troue la crêpe et après c’est chiant on en a plein les doigts. Voila pour la petite leçon de chose mes amis.

Et moi qui croyait vainement avoir une maîtresse, sinon intelligente, douée et sympathique, au moins civilisée...

Même pas. Une barbare.

Tartiner avec une cuillère, je vous demande un peu. Si on appuie trop ça tord la cuillère, pas assez y'a rien sur la tartine, il en reste toujours au fond de la cuillère et c'est frustrant parce que celui qui passe après trouve ça dégueulasse de lécher la cuillère avant qu'il se serve.

Alala. L'utilisation des cuillères pour le nutella et le besoin de religion sont des signes indubitables de l'iminente autodestruction de l'humanité.

Destruction à laquelle je suis fier de participer.

"Qu'on aille me quérir un fidèle croyant!
- Tout de suite puissant Kaev...
- Attends coco, où tu vas là?
- Ben... Quérir un fidèle croyant, ô grand et magnanime Elu...
- Cela sous-entend que tu n'es pas un fidèle croyant?
- Euh... bien sur que si, puissant Kaev...
- Je me disais aussi... Alors tu te portes volontaire pour ma mission, merci de ton enthousiasme.
- Euh...
- Un commentaire?
- C'est que moi je suis le portier, je ne sais pas faire grand chose...
- Bah, Enki a bien réussi à devenir déesse... Quand on a vu ça on peut tout faire...
- Pas faux.
- Hé!
- Quels sont vos ordres, divin Kaev?
- Je te charge d'aller me trouver l'auteur de la lettre exposée dans la salle du trône.
- C'est une vraie??
- Ben oui, pourquoi?
- J'avais cru comprendre qu'elle était adressée à Enki...
- La divine Enki.
- Rêve pas, c'est mon serviteur. Oui, et alors?
- Alors une lettre d'amour adressée à Enki...
- Ouais, je sais, c'est assez surréaliste...
- Hé!
- C'est pour ça que je te demande d'aller me trouver l'expéditeur.
- Bien puissant Kaev. "

Le bonhomme déguerpit, pendant qu'Enki me lorgne d'un oeil morne.

"Pourquoi tu veux trouver ce type?
- Parce que je veux voir un vrai malade mental une fois dans ma vie.
- Prends un miroir.
- Remarque je peux te regarder aussi.
- Trois partout.
- Hein?
- Cherche pas. Ca te ferait quoi si j'avais un mec?
- Vomir.
- T'es jaloux en fait...
- Nan.
- Ah si! Tu me veux pour toi tout seul!
- Mais ça va pas non?? Une lettre d'un débile qui veut se noyer dans tes yeux ou je sais pas quoi et tu te prends pour miss Univers!
- Miss Inter-Univers.
- Ouais... N'empêche, tu vas voir si tu as vraiment un mec... Ta consommation en nutella et en alcool va tripler, déjà...
- Yeah!
- Et je parle pas de ton poids...
- Ah.
- Oui hein?
- Pas si mal le célibat en fait...
- Dans ton cas oui... Ca vaut mieux pour le pauvre mec... "

Le célibat c’est bien.

Tu es libre de faire ce que tu veux le samedi soir.
Complètement libre, y comprit de te morfondre devant le navet à l’eau de rose d’une des chaînes câblés (1), une tablette de crunch ouverte sur les genoux, le paquet de mouchoir à porté de main, en te demandant ce que l’héroïne peut bien avoir de plus que toi à part six tours de poitrine, une jupe anecdotique au ras de la salle de jeu, et des cheveux brillants parce qu’elle le vaut bien.

J’ai déjà une salamandre à gérer c’est pas la peine de rajouter un mec.
Le célibat c’est bien, en plus je suis tout à fait apte à tripler ma consommation d’alcool et de nutella seule. Pas besoins d’aide.

« Tu es vraiment sadique tu sais ?
- Redis le encore, c’est toujours agréable à entendre.
- c’est malin tiens. N’empêche qu’une fois retrouvé je vais être obligé de briser le cœur à ce noble seigneur…
- noble seigneur ! Elle est bien bonne. Et pourquoi ça ? Tu vas lui annoncer que tu es entièrement libre et prête pour le mariage ?
-Kaev !
- Mouhahaha.
- J’ai pas le temps de me consacrer à quelqu’un, j’ai toi, la DT à faire tourner, mes admirateurs à contenter (2), trop de responsabilités pour le moment...Kaev pense à respirer. »
Faut tout faire ici. (3)
Je me lève et balance une grande tape dans le dos de ma salamandre en m’explosant le bras au passage mais en réussissant à dégager les voies respiratoires de la miette de pain qui les encombraient.

« Enfin tu peux t’étouffer autant que tu veux ma décision est prise. Je suis à l’usine si tu me cherches. Mon devoir m’appelle.
- j’aurais tout entendu. »

Je soupire, prends ma tartine et ce qu’il reste de mon bras et me dirige d’un pas décidé vers l’usine de chaussettes. Ca fait longtemps que je n’y ai pas mis les pieds. (4)
Je traverse la salle des trône, le couloir est, et tombe sur…

« Loïc ?
- Enki.
- Divine Enki. Tu es déjà revenu ?
- oui.
- et tu as trouvé qui c’est ?
- oui, facile.
- Dis moi !
- je dois faire mon rapport au Grand Kaev.
Foutu serviteur, y’a rien de pire que la crainte d’un dieu. La loyauté encore ça s’achète mais c’est difficile de proposer pire que de se faire cramer au 32eme degrés par une salamandre pas très équilibré.
- alors viens on va le voir. Demi tour droite ! …l’autre droite.
- pardon j’ai du mal.
- je vois ça.
- j’ai jamais compris, la droite et la gauche, c’est très abstrait.
- non facile, la main droite c’est celle où le pouce est à gauche.
- ça dépends dans qu’elle sens on mets la main.
- ah oui tiens…
- ça philosophe dur dites donc. Déjà là toi ?
- oui ô grand Kaev ! J’ai retrouvé le… le…type.
- parle.
- Enki !
-désolée.
- parle.
- rhaa.
- eh bien il habite juste en face…un certain Gaaaraaa.
- ah.
- continu.
- c’est difficile à dire…
- parle.
- la lettre n’était pas pour Enki.
- Quoi ?? Oh le fourbe !
- elle était en fait destiné à je cite « la grande dame toujours en rouge avec un air ténébreux ».
- mais y’a que Enki. Ici…
-Je crains qu’il y ai méprise, il parlais de vous mon seigneur.
-HAhaha ! Alors celle là ! Elle est géniale ! »





(1) oui les fontaines magiques ont aussi des chaînes câblées. Elles sont faites exprès pour maintenir fermement l’abonné scotché à son fauteuil, en lui interdisant tout mouvement intelligent -du genre ouvrir un livre- tout en lui permettant d’afficher une mine débile de circonstance.
(2) notez ce sont pas eux qui prennent le plus de temps.
(3) même faire avancer l’histoire… Non je déconne.
(4) chaussettes. Pieds. Calembour. Non ? Ok d’accord.

Je fulmine.

Mais alors royalement.

Et Enki se marre.

"Refais-moi ça?
- Le paysan d'en face... Euh... Disons qu'il croit que vous... euh...
- Il te prend pour une nana!! résume Enki, hilare, en usant de sa distinction habituelle.
- Disons que, en admettant que les mots blasphématoires formés par cette créature que vous maintenez par pure charité à vos côtés sont audibles par vos saintes oreilles...
- Hé!
- ...en gros, c'est ça.
- J'hallucine.
- Moi aussi. Mais ça me fait marrer.
- Je vois, oui...
- Puis-je me retirer, puissant Kaev?
- Attends un peu, fidèle croyant... Je souhaiterais te récompenser de tes efforts et de ta loyauté. Dis-moi, sais-tu écrire?
- Oui, puissant Kaev, j'ai eu jadis un vieux et sage maître qui m'enseigna les arcanes de l'écriture; il voulait faire de moi un scribe, mais le ciel en décida autrement et...
- Ouais bon ça va, on s'en fout. Alors... De quelle main écris-tu?
- La droite, puissant Kaev.
- Bien. Tends-moi donc ta main droite, fidèle croyant.
- Voici, puissant Ka...
*KRAK SCROUITCH*
- AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHH!!!
- Ca fait mal hein?
- Pourquoi tu lui as broyé la main??
- Pour qu'il ne puisse pas écrire ce qu'il a appris.
- T'es un grand malade!!
- En effet. M'enfin, tant que tu ne joues pas l'infirmière... (1)
- Il crie encore.
- AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHH!!!
- En effet. Mais c'est bien, il ouvre la bouche.
- Et alors?
- Alors voilà.
- AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA *SCUICH* AAgarlfbluaaaah!!!
- Tu lui as arraché la langue!! (2)
- Exactement, c'est bien, tu es perspicace.
- C'est immonde, ça gicle de partout!
- Au moins il crie plus.
- Gaaaauughnn....
- Il essaie quand même...
- Bel effort.
- T'es pas cool avec tes fidèles.
- N'empêche qu'il peut plus rien dire, ni écrire. Une tombe.
- Moi je suis encore là...
- Oui mais j'ose espérer que la vision de ce qui t'attend si tu tentes un mot sur cette histoire t'ôtera à jamais l'idée de mentionner cet épisode...
- Glups.
- Précisément. Bon, deux secondes, je veux le récompenser quand même, ce pauvre bougre...
- Comme tu es grand et généreux...
- N'est-ce pas?
- C'était de l'ironie.
- Pas pour moi.
- Tssss... "

Je cautérise la langue arrachée de mon fidèle croyant, guéris sa main qui malgré tout ne pourra plus jamais lui permettre de saisir une plume, et fais apparaître pour lui deux sacs remplis de pièces d'or.

"Voilà, comme ça tu pourras aller faire ton marché... Achète pas trop de mana quand même, c'est cher pour ce que c'est...
- Uhi ui'an aaa'ee. (3)
- Bien. Merci de ta fidélité et de ta discrétion, fidèle croyant. "

Je regarde mon barbare portier claudiquer vers sa chambre, puis inspire profondément et me dirige vers la sortie du palais.

"Par là c'est les latrines.
- Ah.
- Tu veux aller où?
- Dehors.
- Le couloir derrière toi, deuxième à gauche.
- Merci.
- De rien. J'aimerais que tu ne défonces pas non plus mes toilettes...
- Vu ce que tes fesses les usent toutes les nuits (4), de toutes façons, il va bientôt falloir en reconstruire...
- Oh! "

Je prends congé de ma maîtresse et me glisse à l'extérieur. Je darde mon regard de braise vers la hutte de branchages où doit se terrer le poétique bigleux à m'avoir envoyé ce truc infâme. Concentrant entre mes doigts la formidable énergie de ce monde, je convoque la boule de feu la plus monstrueuse jamais créée par moi (et je suis pourtant un professionnel).

Et je l'abats sur la cahute. A mort les paysans. Surtout ceux qui font de la poésie.

"Joli travail, commente Enki en arrivant dans mon dos.
- Merci.
- Dis-moi, tu maîtrises un peu la magie de l'eau?
- Quand je ne suis pas transformé en Ondin? Non.
- Dommage.
- Pourquoi?
- Parce que l'incendie que tu as déclenché est en train d'atteindre ton champ de plantes carnivores.
- Non?!?
- Si.
- RHAAAAAAAAAA!!
- Oui hein?
- Efface ce sourire ravi, et laisse-moi trouver une solution...
- Ca va être dur, c'est bien marrant...
- Je te fais remarquer dans un but purement mesquin que je suis malgré tout le seul de nous deux à avoir reçu une carte pour la saint Valentin.
- Alors ça c'est bas.
- Je sais.
- Tu sais toujours tout...
- Exact. "

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(1) En HRP, par contre, elle gère. Je ne vous donne pas les détails, vous baveriez...
(2) Pour ceux qui n'avaient pas compris. Pourtant mes bruitages étaient parfaits...
(3) Ce qui signifie "Oui puissant Kaev". Si vous avez des neurones, vous n'avez pas eu besoin de cette note. Sinon, tout n'est pas perdu, vous pouvez en acquérir en allant visiter le forum officiel de nous ici . Oui je fais ma pub, et alors?
(4) Quatre à six fois par nuit. C'est ça avoir une vessie de fille...